« (…) si l’on nous demandait le bienfait le plus précieux de la maison, nous dirions : la maison abrite la rêverie, la maison protège le rêveur, la maison nous permet de rêver en paix. » (p.25-26)
« (…) la maison est une des plus grandes puissances d’intégration pour les pensées, les souvenirs et les rêves de l’homme. Dans cette intégration, le principe liant, c’est la rêverie. » (p.26)
« Et tous les espaces de nos solitudes passées, les espaces où nous avons souffert de la solitude, désiré la solitude, joui de la solitude, compromis la solitude sont en nous ineffaçables. Et très précisément, l’être ne veut pas les effacer. Il sait d’instinct que ces espaces de sa solitude sont constitutifs. Même lorsque ces espaces sont à jamais rayés du présent, étrangers désormais à toutes les promesses d’avenir, même lorsqu’on n’a plus de grenier, même lorsqu’on a perdu la mansarde, il restera toujours qu’on a aimé un grenier, qu’on a vécu dans une mansarde. » (p.28)
Ces citations de Gaston Bachelard, dans « La Poétique de l’espace », résonnent avec celles de « Schulz sur la maison« , de « Chamoiseau sur maison et enfance« , de « Proust sur les Petites Madeleines« , de « Modiano sur oubli et mémoire« , de Rilke sur le désir d’écrire. Le philosophe français soutient que, dans ses recoins, sa cave, son grenier, sur l’escalier, la maison est habitée par nos songes d’autrefois, nos rêveries, nos moments de solitude intime. Ces trésors des jours anciens, nous pouvons les visiter, les revivifier par le souvenir et l’imagination, par nos rêveries actuelles. Des rêveries qui éveillent des rêveries (endormies). Ce qu’il illustre avec ces vers d’André Lafon, (« Poésies. Le rêve d’un logis », p.91) :
Logis pauvre et secret à l’air d’antique estampe
Qui ne vit qu’en moi-même, où je rentre parfois
m’asseoir pour oublier le jour gris et la pluie.
Voir aussi Nizon sur rêverie.