« C’est cela qui n’a cessé de me souffler à l’oreille la jota majorquine : il n’y aura jamais rien de meilleur que la vie. »
Ayant ressenti à l’occasion d’une fête populaire majorquine une joie comparable à celle de Proust goûtant ses petites madeleines, Clément Rosset donne à son moment de plénitude une interprétation différente.
« La joie proustienne était liée au pressentiment d’une reconnaissance, dont l’effet était essentiellement d’abolir le sentiment du temps délétère, générateur de dégradation et de mort. La mienne était différente et concernait plutôt une intuition de l’existence perçue comme occasion de réjouissance infinie et impersonnelle : ce n’est pas moi, comme le suggère Proust, qui me trouvais libéré des servitudes du temps, c’est l’existence en soi, la mienne comme celle de tout être et de toute chose au monde, qui m’apparaissait comme à jamais désirable et à jamais justifiée (…) Proust est tout à fait fondé à dire dans ces pages que cet afflux de bonheur agit comme une invasion de plaisir isolé de toute notion de cause. Car c’est précisément parce qu’elle est sans cause que la joie est irréfutable. » (p.81)
« C’est cela qui n’a cesse de me souffler à l’oreille la jota majorquine : il n’y aura jamais rien de meilleur que la vie. » (p.82)